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Accord gazier sino-russe : les enjeux d’une coopération énergétique

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Après dix ans de négociations concernant un accord de livraison de gaz , butant inlassablement sur le prix que Pékin paierait à Moscou , un terrain d’entente a finalement été trouvé entre la Russie et la Chine. La société chinoise CNPC et Gazprom ont en effet conclu, ce mercredi 21 mai, un contrat d’approvisionnement en gaz. Qualifié de « méga-contrat » ou encore d’ « historique » par la presse , ce dernier prévoit la livraison à terme de 38 milliards de mètres cubes de gaz par an. Les premières estimations font état d’un coût de 400 milliards de dollars sur 30 ans avec un prix de 350 dollars par mètre cube (il est à titre de comparaison d’environ 380 dollars pour les exportations vers l’Europe).

Cet accord, évoqué pour la première fois en 1997, permettra à la Russie une diversification de ses débouchés, bienvenue dans le contexte de la crise ukrainienne et de la recherche par l’Union européenne d’une diminution de sa dépendance à l’égard de Moscou. Ce contrat assure par ailleurs une certaine stabilité à la Russie, à la différence des contrats qu’elle a avec les pays européens souvent de plus courte durée. L’accord reste néanmoins de faible ampleur : la Chine représentera moins d’un quart des livraisons à destination de l’UE. Aussi, la Russie ne va pas « détourner » son gaz de l’ouest vers l’est : la Sibérie orientale alimentera le gazoduc chinois tandis que la Sibérie occidentale fournit elle l’Europe qui reste prioritaire avec 160 milliards de mètres cubes de gaz.

La Chine, premier pays consommateur d’énergie au monde et qui a importé  53 milliards de mètres cubes de gaz en 2013, soit une augmentation de 25% par rapport à 2012 y trouve aussi son compte. Malgré les nombreuses annonces concernant l’exploitation du gaz de schiste, de nombreuses difficultés techniques (apport en eau, modalité d’extraction) remettent en cause la faisabilité du projet. Le contrat permettra de diminuer sa dépendance vis-à-vis du charbon et de limiter la pollution de l’air.

Un contrat symbolique d’une alliance d’une nature nouvelle ?

Ce contrat s’inscrit dans la continuité de la politique bilatérale de ces deux pays. A son arrivée à Shanghai Vladimir Poutine déclarait que les relations sino-russes étaient à « leur plus haut niveau  historique», déclarations renvoyées par son homologue chinois. Le contexte géopolitique régional de chacun des deux pays explique ce rapprochement, bien qu’ils soient dans des situations différentes. Tandis que la Chine est une puissance ascendante en quête de territoire, la Russie est une ancienne puissance qui tente de résister à son rétrécissement. Néanmoins, à l’image de ce contrat qui confère aux deux parties un succès interne, la relation bilatérale est la source d’une nouvelle forme de puissance que le chercheur Bobo Lo qualifie d’ « axe de commodité » (1). La Russie joue un rôle fondamental dans les rapports de la Chine avec ses pays voisins, notamment l’Asie centrale tandis que la Russie tire de cette relation une plus grande crédibilité, notamment dans sa posture face aux Occidentaux. Néanmoins, la Chine demeure prudente,  l’Europe étant son premier client commercial. Aussi, le principe d’intangibilité des frontières peu respecté par la Russie entre en contradiction avec le principe de non-ingérence prôné par  la diplomatie chinoise.

Favorisée par le pivot américain vers l’Asie, l’isolement de la Russie par l’Occident et l’approche conservatrice commune de la politique internationale par les nouvelles équipes dirigeantes chinoises et russes, l’alliance sino-russe n’a pas fini de faire parler d’elle.

 

(1) Axis of covenience : Moscow, Beijing and the New Geopolitics, Bobo Lo, 2008.

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